Les sanctions administratives
Les entreprises et notamment les ICPE doivent respecter les règles et les prescriptions au risque de se voir réprimer par des sanctions administratives.
Qu’est ce que les sanctions administratives ? Que risquent les entreprises ?
1. Définition des sanctions administratives
Le Conseil d’État définit les sanctions administratives comme « une décision administrative qui émane d’une autorité administrative visant à réprimer un comportement fautif« .
LES DÉCISIONS ADMINISTRATIVES
Tout d’abord, dans le cadre des ICPE, les autorités administratives peuvent prendre plusieurs types de décisions administratives pour réguler, surveiller ou sanctionner les installations. Ces décisions visent à garantir la protection de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité.
Décisions relatives à l’autorisation ou à l’enregistrement
Les autorités compétentes peuvent émettre un refus d’autorisation ou d’enregistrement si les risques ou impacts environnementaux sont jugés élevés.
Mises en demeure
La mise en demeure est un ordre adressé à l’exploitant pour remédier à une non-conformité ou pour respecter les prescriptions de l’arrêté préfectoral. La réalisation des mesures correctives doit se faire dans un délai mentionné dans la mise en demeure.
Le non-respect des conditions d’exploitation constaté par l’inspecteur fait l’objet d’une mise en demeure par le préfet et l’obligation de les appliquer dans un délai déterminé.
À noter que la mise en demeure de respecter les prescriptions applicables n’impose pas de nouvelles mesures à l’exploitant mais s’attache à décrire les prescriptions visées et en quoi l’exploitant ne les a pas respectées.
Selon l’article L171-7 du Code de l’environnement, lorsqu’il y a constatation du non-respect des conditions d’exploitation, l’inspecteur propose au préfet de mettre en demeure l’ICPE exploitée sans autorisation, enregistrement ou déclaration. L’exploitant a l’obligation de régulariser sa situation dans un délai d’un an en déposant un dossier.
Modification des prescriptions
Lorsque l’inspecteur constate des prescriptions inadaptées ou insuffisantes, il propose au préfet de modifier les conditions d’autorisation via un arrêté préfectoral complémentaire. Il peut alors ajouter ou ajuster des prescriptions techniques en cas de nouvelles informations sur les risques ou de changement dans l’exploitation. Il peut également imposer des mesures supplémentaires pour mieux encadrer l’activité ou prévenir des risques spécifiques.
Mesures d’urgence
Des mesures d’urgences peuvent être également prises afin de prévenir les dangers graves et imminents pour la santé, la sécurité publique ou l’environnement (ex : pollution accidentelle). Des mesures conservatoires accompagnent généralement les mesures d’urgence pour protéger l’environnement.
Astreinte financière
L’autorité administrative peut également imposer une astreinte journalière, c’est-à-dire une pénalité financière progressive pour inciter l’exploitant à se conformer à ses obligations.
Arrêt de l’activité
L’arrêt de l’exploitation présente différents degrés :
- Suspension de l’activité temporairement ou définitivement en cas de danger grave ou imminent pour l’environnement.
- Retrait de l’autorisation en cas de non-respect récurrent des obligations.
- Fermeture de l’exploitation.
Exécution d’office
Enfin, l’autorité administrative peut faire exécuter d’office les travaux de mise en conformité par un tiers au frais de l’exploitant.
L’AUTORITÉ ADMINISTRATIVE
Dans le cas des ICPE, plusieurs autorités administratives ont un rôle dans les décisions :
- Le Préfet de Région : il examine au cas par cas les projets.
- Le Préfet de Département : il rend des décisions au cas par cas en lien avec les modifications, extensions, installations, ouvrages ou travaux.
- Les DREAL : elles instruisent les dossiers.
- Les MRAe : elles expriment des avis indépendants pour la préparation des décisions environnementales.
LE COMPORTEMENT FAUTIF
En matière d’ICPE, le comportement fautif est une action ou une omission imputable à l’exploitant de l’installation. C’est ce comportement qui peut entraîner des sanctions administratives, civiles ou pénales :
- Absence d’autorisation d’exploiter.
- Non-respect des prescriptions réglementaires.
- Manque d’entretien ou de contrôle de l’installation.
- Déclaration erronée ou absente.
- Gestion inadéquate des déchets ou des produits dangereux.
- Mauvaise anticipation des risques environnementaux.
- Absence de réaction en cas d’accident.
- Non-conformité volontaire.
2. Les sanctions administratives vs les autres sanctions
LES CARACTÉRISTIQUES DES SANCTIONS ADMINISTRATIVES
Les sanctions administratives regroupent 3 critères principaux :
- Il s’agit d’une décision unilatérale.
- Elle doit être prise par une autorité administrative.
- La décision doit réprimer une infraction.
LES SANCTIONS ADMINISTRATIVES VS LES SANCTIONS PÉNALES
La sanction administrative se distingue de la sanction pénale sur plusieurs points.
Sanction administrative
- Elle émane d’une autorité administrative.
- Elle a un but répressif.
- Elle relève du juge administratif.
Sanction pénale
- Elle est prononcée par une autorité juridictionnelle.
Mesure de police
- Elle émane d’une autorité de police administrative.
- Elle a un but préventif afin d’éviter un trouble à l’ordre public.
- Elle doit être proportionnelle aux troubles qu’elle a pour but de prévenir.
- Elle doit être motivée et une procédure contradictoire doit être mise en œuvre.
- Elle relève du juge administratif.
3. Le rôle du juge administratif
Dans le cas des ICPE, le juge administratif dispose d’un pouvoir de plein contentieux, c’est-à-dire que toutes les décisions qu’il prend vont au-delà d’une simple annulation ou confirmation. Il peut, par exemple, accorder une autorisation refusée par le préfet, modifier ou imposer des prescriptions techniques, réformer totalement ou partiellement un arrêté préfectoral… Le juge administratif a donc des pouvoirs très étendus en matière d’ICPE.
4. La contestation d’une décision
Les exploitants peuvent contester une décision administrative via deux grandes voies de recours : le recours gracieux (ou hiérarchique) et le recours contentieux. Ainsi, ces procédures permettent de garantir que les décisions prises respectent la légalité et sont proportionnées aux buts poursuivis.
LE RECOURS GRACIEUX OU HIÉRARCHIQUE
Définition
Le recours gracieux ou hiérarchique est une démarche non contentieuse qui consiste à demander à l’autorité administrative de revoir sa décision.
C’est auprès de l’autorité compétente qui a pris la décision que le recours gracieux doit se formuler (généralement le Préfet). Quant au recours hiérarchique, il est adressé à une autorité supérieure (Ministère de l’environnement si c’est le Préfet qui a pris la décision).
L’objectif est d’obtenir une révision de la décision, sans recourir à un juge, en mettant en avant des arguments juridiques, techniques ou factuels susceptibles de convaincre l’administration.
Mise en œuvre
L’exploitant a un délai de 2 mois, à compter de la notification ou de la publication de la décision, pour exercer un recours gracieux ou hiérarchique. L’exploitant dépose, par LRAR ou par voie électronique, son recours en détaillant les motifs du désaccord, les arguments de droit ou de fait et les pièces justificatives.
Aussi, la soumission d’un recours gracieux interrompt le délai de deux mois pour saisir le tribunal administratif, qui recommence à courir dès la notification de la réponse (ou l’absence de réponse après deux mois).
Attention : la décision contestée reste applicable, sauf si l’administration en décide autrement.
Résultat possible
L’administration peut décider de confirmer la décision initiale ou modifier/annuler la décision si les arguments avancés le justifient.
Ce recours a l’avantage d’être rapide, peu coûteux et de favoriser une résolution amiable.
LE RECOURS CONTENTIEUX
Le recours contentieux est, quant à lui, une procédure judiciaire permettant de contester une décision administrative devant une juridiction compétente. Dans le cadre des ICPE, il s’agit généralement du tribunal administratif.
Définition
Le recours contentieux vise à faire annuler ou modifier la décision administrative en démontrant son illégalité. Les arguments peuvent porter sur :
- Une erreur de droit (non-respect des textes réglementaires).
- Une erreur de fait (interprétation erronée des circonstances ou des données techniques).
- Un excès de pouvoir (abus ou disproportion dans l’application des pouvoirs conférés à l’administration).
Mise en œuvre
Pour introduire un recours contentieux, l’exploitant a un délai de deux mois suivant :
- La notification ou la publication de la décision administrative.
- Ou la réponse (ou absence de réponse) à un recours gracieux.
La requête doit être déposée auprès du tribunal administratif, accompagnée d’un mémoire explicatif, des pièces justificatives et d’un exemplaire de la décision contestée.
En principe, l’introduction d’un recours contentieux n’entraîne pas la suspension de l’exécution de la décision. Toutefois, une demande de référé suspension peut être formulée pour demander la suspension temporaire en cas d’urgence et de doute sérieux sur la légalité de la décision.
Le tribunal examine les arguments présentés par les parties et peut demander des expertises techniques.
Résultats possibles
Le tribunal administratif peut :
- Annuler la décision : si la décision est jugée illégale, elle est annulée avec effet rétroactif. Les actes pris sur la base de la décision annulée ou réformée deviennent également caducs (par exemple, des sanctions basées sur un arrêté préfectoral annulé).
- Réformer la décision : le juge peut imposer une modification.
- Rejeter le recours : si les arguments ne sont pas fondés, la décision initiale est maintenue.
L’administration peut être tenue d’indemniser les parties lésées en cas de faute grave.
À retenir
Les ICPE sont soumises à un cadre réglementaire strict visant à protéger l’environnement, la santé publique et la sécurité. Le non-respect des obligations peut entraîner des sanctions administratives, qui constituent un outil essentiel pour garantir la conformité des installations.
Pour les exploitants, la contestation de ces décisions peut se faire par différents recours mais elle doit toujours être motivée.