La réglementation sur la Vidéosurveillance
Les caméras de surveillance font aujourd’hui partie de notre quotidien et de notre paysage. La mise en place d’un tel système ne se fait pas au hasard. L’installation et l’utilisation de la vidéosurveillance par l’employeur doit répondre à un objectif clair et précis. Cet objectif est d’assurer la sécurité des biens et des personnes. De ce fait, la réglementation de la vidéosurveillance est stricte.
Quelles règles doit-on respecter lors de l’installation de la vidéosurveillance sur son lieu de travail ? Que disent la loi et la jurisprudence sur ce sujet ?
1. Le fondement : le droit à la vie privée
LE CODE CIVIL
L’article 9 du Code Civil dispose que « Chacun a droit au respect de sa vie privée ». C’est LE principe de base. De ce fait, l’installation des caméras de surveillance peut être jugée intrusive. Iil est donc primordial que la mise en place d’un tel système réponde à un objectif clair et précis.
LE CODE DU TRAVAIL
En outre, l’article L.1121-1 du Code du Travail dispose que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ». La mise en place de caméras ne se fait donc pas au hasard. L’installation se fait en fonction des dangers et des risques présents. Sinon, les instances peuvent considérer cette installation abusive.
Enfin, l’article L.1222-4 dispose que la collecte d’information non portée à la connaissance du salarié est interdite. L’employeur doit informer son personnel de l’existence d’un tel système.
Toutefois, il y a la loi mais la jurisprudence reflète la façon dont les instances vont l’interpréter. Les différents arrêts rendus par la Cour de Cassation jouent donc un rôle primordial sur ce sujet.
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2. La vidéosurveillance strictement encadrée
SUR L’INSTALLATION
La réglementation
Comme expliqué précédemment, l’installation de la vidéosurveillance sur le lieu de travail doit répondre à un but précis et clair. Il s’agit de protéger les biens et les personnes, identifier les auteurs d’un vol ou être présente pour dissuader tout cambriolage, toute dégradation ou toute agression ( cf. CNIL).
- Aux entrées et sorties d’un site.
- Aux issues de secours.
- Aux circulations (allées, couloirs…).
- Dans les zones de stockage de biens.
- Sur des zones à risque (zone d’encaissement dans un magasin, par exemple, mais la caméra doit filmer la caisse et le côté client et non pas le salarié directement).
- Sur les postes de travail de sorte à permettre une surveillance constante et permanente.
- Dans les zones de pause, les toilettes.
- Dans les locaux syndicaux, les locaux des représentants du personnel et les couloirs y menant.
Un peu de jurisprudence
La Cour de Cassation a jugé disproportionnée l’utilisation de la vidéosurveillance constante dans un arrêt du 23 juin 2021. En l’espèce, un employeur licencie un salarié travaillant seul en cuisine pour faute grave. Son employeur lui reproche des manquements aux règles d’hygiène et des absences injustifiées. La Cour de Cassation précise que cette surveillance constante est disproportionnée « au regard du but alloué par l’employeur, à savoir la sécurité des personnes et des biens » (Cour de Cassation, Chambre Sociale, 23 Juin 2021, Pourvoi N°19-13.856).
Dans un arrêt du 22 Septembre 2021, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a jugé qu’un système de vidéosurveillance ne constitue pas un mode de preuve illicite dès lors qu’il ne sert pas à surveiller le salarié dans l’exercice de ses fonctions. En l’espèce, une société avait licencié un salarié pour faute grave en apportant la preuve avec des images versées par une caméra de surveillance (Cour de Cassation, Chambre Sociale, 22 Septembre 2021, Pourvoi N°20-10.843).
SUR LA CONSULTATIONS DES IMAGES
Il est tout à fait possible de regarder les images à distance, sur tous types de supports. Toutefois, cela ne doit pas amener l’employeur à surveiller ses collaborateurs. De plus, l’accès à distance se fait avec un accès sécurisé. L’employeur décide qui peut regarder les images dans le cadre de leurs fonctions. Et pour l’utilisation de la vidéosurveillance, ces personnes nécessitent une formation.
SUR LA SAUVEGARDE DES IMAGES
Quant à la sauvegarde des images, c’est l’employeur qui décide. La CNIL rappelle que la durée ne se fixe pas « en fonction de la capacité de sauvegarde mais bien pas rapport au but fixé ». En principe, la durée ne doit pas dépasser 1 mois.
SUR L’INFORMATION DU PERSONNEL
La réglementation
L’information du personnel est obligatoire grâce aux panneaux d’affichage qui comportent :
- Le pictogramme d’une caméra
- La durée de conservation des images
- Le nom, la qualité et le numéro de téléphone du responsable à la protection des données
- L’existence de droits « Informatique et Libertés »
- Le droit d’introduire une réclamation auprès de la CNIL.
Un peu de jurisprudence
La Chambre Sociale de la Cour de Cassation, dans un arrêt du 20 Septembre 2018, a retenu le fait qu’un licenciement d’un salarié pour faute grave (en l’occurrence pour avoir commis un vol,) est abusif dès lors que l’employeur n’a pas informé le personnel de la présence de caméras (cf. Vol en entreprise, que faire). La Cour de Cassation conclue que les images produites de manière illicites « empêchent également d’exploiter les éléments de preuve qui en découlent ». Le licenciement n’a donc pas de cause réelle et sérieuse (Cour de Cassation, Chambre Sociale, 20 Septembre 2018, Pourvoi N°16-26.482).
Des exceptions existent et notamment pour les lieux non accessibles aux salariés. En effet, dans un arrêt du 19 avril 2005, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a jugé que l’employeur n’était pas tenu de divulguer l’existence de caméras dans des zones inaccessibles aux salariés. Ainsi, l’employeur peut utiliser la vidéosurveillance pour établir la preuve des faits reprochés (Cour de Cassation, Chambre Sociale, 19 Avril 2005, Pourvoi N°02-46.295).
Dans l’ arrêt du 22 Septembre 2021, suscité, la Cour de Cassation admet que « si le système de vidéo-surveillance a été installé dans un but de sécurisation de la zone de stockage qui n’était pas ouverte au public, et du couloir y donnant accès » et si « les caméras étaient disposées de telle sorte qu’elles permettaient de visualiser les portes de toilettes », alors la société n’avait pas à informer le salarié de sa présence. De ce fait, l’information préalable du salarié n’était pas requise dès lors que la vidéosurveillance est utilisée pour assurer la sécurité d’un site et non pour contrôler l’activité des salariés. La preuve est donc recevable pour justifier du licenciement.
SUR LA CONSULTATION DU CSE
La réglementation
Par ailleurs, l‘article L.2312-38 du Code du Travail précise que le CSE est informé et consulté, avant toute décision, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés ». Les représentants du personnel doivent être informés en amont de l’installation d’un dispositif de vidéosurveillance dès lors qu’il a pour objectif de contrôler l’activité des salariés.
Un peu de jurisprudence
Dans le même arrêt du 22 Septembre 2021, la Cour de Cassation considère que l’article L.1222-4 du Code de Travail (sur l’information préalable des salariés) n’est applicable que si la vidéosurveillance contrôle l’activité des salariés. Or, en l’espèce, comme la vidéosurveillance ne s’utilise pas pour contrôler le salarié dans l’exercice de ses fonctions, il n’y avait pas lieu de consulter les représentants du personnel en amont. La notion de « contrôle des salariés » est donc la notion à prendre en compte pour savoir s’il faut consulter ou non le CSE :
Si l’installation de la vidéosurveillance permet un contrôle de l’activité des salariés
=
Information des collaborateurs et des représentants du personnel.
Si l’installation de la vidéosurveillance ne contrôle pas l’activité des salariés
=
Pas d’information des représentants du personnel.
Maintenant que vous comprenez mieux la réglementation entourant la vidéosurveillance, découvrez les 5 bonnes raisons d’opter pour la télésurveillance.
À retenir
L’installation de la vidéosurveillance dans une entreprise est strictement encadrée. Si l’employeur est totalement libre d’installer ou non un tel système, ce dernier doit respecter plusieurs étapes :
- Définir un but précis et clair.
- Informer le personnel et le CSE s’il y a un contrôle des salariés dans leur activité.
- Afficher un panneau aux accès du site indiquant la présence du système aux salariés et aux visiteurs.
- Inscrire ce dispositif dans le traitement des données (RGPD).
Quant à l’utilisation de la vidéosurveillance comme preuve devant la justice, cette dernière reste à l’appréciation des juges en fonction des circonstances.
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